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L’utilisation des médias sociaux peut-elle être problématique chez les adolescents ?

Dernière mise à jour : 25 sept. 2023

Synthèse de l’article : Marino, C., Gini, G., Angelini, F., Vieno., A. & Spada, M. (2020). Social norms and emotions in problematic social media use among adolescents. Addictive Behaviors Reports, 11, 100250. https://doi.org/10.1016/j.abrep.2020.100250


Synthèse rédigée par Safia Makhlouf et Victorine Darnis-Trigla, Master 2 de Psychologie du développement, éducation, troubles et problématiques actuelles, Université Paris 8.


Être constamment connecté sur Tiktok, publier des selfies sur son compte instagram, ne pas manquer l’information importante du groupe Whatsapp de la classe… voici la “façon d’être” des adolescents de nos jours sur les médias sociaux. Cette utilisation des médias sociaux serait problématique si elle est liée à la fois à des symptômes addictifs (par exemple une fréquence d’utilisation importante) et à des caractéristiques spécifiques à internet (comme la préférence pour les interactions sociales en ligne plutôt qu’en face à face) (Van den Eijnden et al., 2016). Cette pratique intense des médias sociaux n’est pas sans conséquence sur le développement des adolescents puisqu’elle pourrait entraîner une altération du fonctionnement social et émotionnel et une baisse du bien-être subjectif, notamment une altération du fonctionnement social et émotionnel et une baisse du bien-être subjectif (Marino, 2018).


Les adolescents passent beaucoup de temps avec leur groupe de pairs, dont l’influence sur le comportement est importante (Prinstein & Dodge, 2008). Et si le groupe d’amis pouvait influencer de manière problématique l’utilisation des médias sociaux chez l’adolescent ? Quant aux difficultés de régulation des émotions des adolescents, ont-elles des conséquences sur l’utilisation problématique des médias sociaux (UPMS) ?


Pourquoi étudier le groupe d’amis comme une influence dans l’utilisation problématique des médias sociaux ?

Les groupes d’amis, comme d’autres groupes sociaux, sont caractérisés par des normes sociales et des standards de comportements qui peuvent influencer le comportement de l’individu (Marino et al., 2020). Bien que l’influence des pairs sur le comportement des adolescents ait été confirmée à plusieurs reprises (Katsumata et al., 2008 ; Nesi et al., 2018 Prinstein & Dodge, 2008), on constate une absence de recherche sur l’influence des amis et des normes du groupe sur l’utilisation problématique en ligne des adolescents.


Pourquoi étudier les émotions comme facteur d’influence dans l’utilisation problématique des médias sociaux ?

La régulation émotionnelle renvoie à l’évaluation de ses propres émotions (c'est-à-dire la conscience, la compréhension et l’acceptation de ses émotions) et à la capacité à contrôler ses comportements (c’est-à-dire adapter son attitude en fonction de la situation) (Gratz & Roemer, 2004). Les difficultés à réguler ses émotions sont apparues comme un facteur de risque dans l’utilisation problématique de Facebook chez les adolescents (Marino et al., 2016). Cependant, peu d’études dans la littérature scientifique examinent la façon dont les adolescents ayant une difficulté à réguler leurs émotions utilisent les médias sociaux pour gérer leurs émotions en ligne. Les émotions en ligne se définissent par l’expression, la perception et la compréhension des émotions en ligne. On parle du nouveau concept d’« e-motion » récemment proposé par Zych et ses collaborateurs (2017).

Quelles sont les hypothèses des auteurs ?

Marino et al. (2020) ont souhaité déterminer en quoi la contribution simultanée du contexte social et de la régulation des émotions pourrait être associée à une utilisation problématique des médias sociaux chez les adolescents. Ils émettent l’hypothèse que l’Utilisation Problématique des Médias Sociaux (UPMS) des adolescents serait influencée par les normes sociales liées à l’utilisation des médias sociaux dans le groupe de pairs. Il est attendu que l’UPMS des adolescents soit influencée par l’utilisation perçue des médias sociaux par les pairs. En ce qui concerne les caractéristiques individuelles, les chercheurs s’attendent à ce que les difficultés de régulation des émotions soient liées à l’UPMS des adolescents. Enfin, Marino et al. (2020) postulent que les difficultés de régulation émotionnelle pourraient être associées à une utilisation accrue des émotions électroniques, à savoir les émoticônes, ces visages colorés exprimant une émotion.


Comment ont-ils réalisé leur étude ?

761 participants âgés d’environ 15 ans ont pris part à l’étude. Les participants sont des adolescents d'écoles secondaires publiques italiennes. Ils ont rempli des questionnaires anonymes d'auto-évaluation mesurant l’UPMS à travers : l’échelle des troubles liés aux médias sociaux (Van den Eijnden et al., 2016), la fréquence d’utilisation des médias sociaux au cours d’une journée (Marino et al., 2016), les normes sociales (à l’aide de 4 items comme “mes amis pensent que je devrais passer beaucoup de temps sur les médias sociaux” ; Marino et al., 2016), la fréquence perçue de l'utilisation des médias sociaux par les amis (Marino et al., 2016), la difficulté de régulation des émotions (DERS ; Sighinofi et al., 2010) et l’expression, la perception et la compréhension des émotions en ligne à travers le questionnaire “E-motions” (Zych et al., 2017).


Quels sont les résultats de l’étude ?

Le contexte social joue un rôle significatif dans l’UPMS des adolescents. En effet, plus ils perçoivent l'utilisation des médias sociaux de leurs amis comme fréquente, plus ils sont susceptibles d'utiliser eux-mêmes les médias sociaux. De plus, les résultats obtenus montrent que la pression exercée par les pairs pour utiliser les médias sociaux de manière très fréquente, et les attentes d’être constamment disponible sur les médiaux sociaux est un facteur de risque d’UPMS. Par ailleurs, les adolescents ayant une difficulté à réguler leurs émotions sont tentés de gérer leurs émotions négatives en recherchant une distraction via l’utilisation des médias sociaux et en augmentant leur fréquence d’usage. De plus, les difficultés de régulation des émotions contribuent de manière significative à la facilitation de l’utilisation des e-motions. La communication de son état émotionnel sur les médias sociaux est associée à un mode d’utilisation problématique des médias sociaux, puisque cela est considéré comme un outil préférentiel pour surmonter les difficultés ou renforcer ses relations afin d’échapper à l’inconfort des interactions en face à face.


Ne paniquez pas !

L’utilisation des médias sociaux chez les adolescents n’est pas à bannir. Au contraire, les médias sociaux peuvent avoir un impact positif sur la solitude (Yang & Brown, 2013), sur le maintien des relations pendant l'adolescence (Jordán-Conde et al., 2014) et peuvent jouer un rôle dans la formation de l'identité en permettant aux jeunes utilisateurs d'expérimenter différents comportements et styles d'interaction (Valkenburg & Peter, 2011). Par ailleurs, les médias sociaux, en particulier Facebook, peuvent avoir un impact positif sur les symptômes de l'humeur et d'autres troubles mentaux (Shepherd & Edelmann 2005).


Toutefois, il est important d’inclure des discussions sur les attentes sociales au sein du groupe de pairs et sur les aspects de l’intelligence émotionnelle afin de mieux prévenir la mauvaise utilisation des médias sociaux par les adolescents.

Les approches socio-émotionnelles pourraient-être utiles pour lutter contre l’Utilisation Problématique des Médias Sociaux chez les adolescents. Les compétences socio-émotionnelles (CSE) telles que la conscience de soi, l’autogestion, la conscience sociale, les compétences relationnelles et la prise de décision jouent un rôle essentiel dans le bien-être individuel (Domitrovich et al., 2004). Du point de vue des programmes de prévention et d’intervention, il a été démontré que l’apprentissage des CSE par les adolescents est efficace pour modifier la dynamique sociale et améliorer les compétences émotionnelles (Durlak et al., 2011).

REFERENCES
Durlak, J., Weissberg, R. P., Dymnicki, A. B., Taylor, R., & Schellinger, K. B. (2011). The impact of enhancing students' social and emotional learning: a meta-analysis of school-based universal interventions. Child Development, 82(1), 405-432. Gratz, K. L., & Roemer, L. (2004). Multidimensional assessment of emotion regulation and dysregulation: Development, factor structure, and initial validation of the difficulties. Journal of Psychopathology and Behavioral Assessment, 26, 41-54. Jordan-Conde, Z., Mennecke, b., & Townsend, A. (2014). Late adolescent identity definition and intimate disclosure on Facebook. Computers in Human Behavior, 33, 356-366. Katsumata, Y., Matsumoto, T., Kitani, M., & Takeshima, T. (2008). Electronic media use and suicidal ideation in Japanese adolescents. Psychiatry and Clinical Neurosciences, 62(6), 744-746. Marino, C. (2018). Quality of Social Media Use May Matter More than Frequency of Use for Adolescents' Depression. Clinical Psychological Science, 6(4), 455. Marino, C., Vieno, A., Pastore, M., Albery, I. P., Frings, D., & Spada, M. M. (2016). Modeling the contribution of personality, social identity and social norms to problematic Facebook use in adolescents. Addictive Behaviors, 63, 51-56. Nesi, J., Choukas-Bradley, S., & Prinstein, M. (2018). Transformation of adolescent peer relations in the social media context: Part 1 - a theorical framework and application to dyadic peer relationships. Clinical Child and Family Psychology Review, 21(3), 267-294. Prinstein, M. J., & Dodge, K. A. (2008). Understanding peer influence in children and adolescents. New York: Guilford. Shepherd, R. M., & Edelmann, R. J. (2005). Reasons for internet use and social anxiety. Personality and individual differences, 39, 949-958.
Sighinolfi, C., Norcini Pala, A., Chiri, L. R., Marchetti, I., & Sica, C. (2010). Traduzione e adattamento italiano del Difficulties in Emotion Regulation Strategies una ricerca perliminare. Psicoterapia Cognitiva e Comportamentale, 16(2), 141-170.
Valkenburg, P. M., & Peter, S. (2011). Online communication among adolescents: An integrated model of its attraction, opportunities, and risks. Journal of Adolescent Health, 48, 121-127.
Van den Eijnden, R., Lemmens, J., & Valkenburg, P. (2016). The social media disorder scale.
Computers in Human Behavior, 61, 478-487.
Yang, C. C., & Brown, B. B. (2013). Motives for using Facebook, patterns of Facebook activities, and late adolescents' social adjustment to college. Journal of Youth and Adolescence, 42(3), 403-416.
Zych, I., Ortega-Ruiz, R., & Marin-Lopez, I. (2017). Emotional content in cyberspace: Development and validation of E-motions Questionnaire in adolescents and young people. Psicothema, 29(4), 563-569.
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